L'armée de l'Air au-dessus de Dunkerque

Une figuration bien symbolique


L'opération Dynamo, qui débuta officiellement le 26 mai, fut couverte par la Royal Air Force.  Fatalement, la Luftwaffe fit son possible pour s'y opposer et c'est principalement de son action dont les troupes au sol furent les témoins. Pourtant la France n'abandonna pas la couverture de ses troupes prises au piège dans la poche de résistance qui s'était formée. Outre quelques expéditions de bombardiers, un petit détachement devait être envoyé au plus près des combats.

Réorganiser le soutien aérien :

Les échelons volants des unités aériennes engagées en soutien des Ire et VIIe armées avaient été repliés entre le 16 et le 22 mai 1940. Restait les échelons roulants qui tentèrent de gagner les ports de la Manche pour être évacués par la mer... tous n'y parvinrent pas.

Le 25 mai, au cours d'une réunion se déroulant au PC de la ZOAN, il fut décidé d'envoyer une petite force en Angleterre. Cette dernière de composait d'une section de Potez 63-11 du GR I/14 et une escadrille de Bloch MB-152 du GC II/8. Les deux groupes devaient se rassembler dans le Calvados avant de faire traverser la Manche à leur détachement.




Le 27 mai, trois P. 63-11 partirent pour Tangmere, où on ne les attendaient pas... Ils rejoignirent finalement Lympne et, avec l'aide d'une mission française présente sur place, récupérèrent du matériel pour organiser leur camp et y travailler. À cause du mauvais temps, il fallut attendre l'après-midi du 30 pour que les 13 MB-152 traversassent à leur tour la Manche ! Mais il était impossible de refaire les pleins d'huile et ils restèrent inutilisables une journée de plus...

L'intervention du détachement de Lympne :

Pendant ce temps, les P. 63-11 avaient chômé : il était impossible d'établir une liaison radio durable avec la poche ! Le seul soutien aérien du camp retranché vint, la nuit, de quelques bombardements effectués par des bombardiers Amiot 143 et Bloch MB-210... ainsi que d'une mission de parachutage nocturne de ravitaillement dont on peut douter de l'efficacité.

La première mission du GR I/14 se déroula donc le 31 mai, dans l'après-midi ; puisque les MB-152 étaient cloués au sol, l'escorte fut fournie par des Hurricane. Les appareils français n'opérèrent donc de conserve que pendant... 3 jours, du 1er au 3 juin 1940, à cinq reprises. Les bimoteurs français effectuèrent des missions quotidiennes, principalement au profit de l'artillerie du 16e Corps d'armée ; dans ce cadre, les renseignements sur les batteries allemandes étaient transmis directement par radio. Au GC II/8, malgré six missions effectuées, les pilotes ne revendiquèrent qu'une victoire sûre et une probable... mis n'endommagèrent qu'un bombardier. De plus, ils ne furent pas toujours capables de protéger le Potez qu'ils escortaient ! Heureusement, il n'y eut aucune perte. Le 4 juin à 10 h, l'ordre de cesser les missions au-dessus de la poche tomba ; en soirée, les aviateurs français reçurent leurs consignes de repli, à exécuter le lendemain.


Dans le même temps, la Grande-Bretagne servit également d'étape pour nos rares bombardiers engagés au-dessus du secteur, le 1er juin. 2 Glenn Martin 167-F gagnèrent Shoreham avant d'aller larguer du matériel médical au-dessus de Zuydcote. La mission échoua en partie à cause de la Flak et ils revinrent ensuite à Tangmere ; ils rentrèrent à Saint-André-de-l'Eure, le lendemain. De même, 5 à 6 à six Vought 156-F de l'escadrille AB1 firent étape à Tangmere, avant d'aller bombarder une batterie allemande à Bergues. Ils rentrèrent directement à Querqueville, sauf 2 qui gagnèrent Hawkinge pour la nuit.

Bilan :

Bien évidemment, la faiblesse des moyens alloués n'aurait pas permis un miracle. Mais on peut constater que le détachement français fut mis en œuvre avec une certaine précipitation, sans réelle coordination, semble-t-il, avec notre allié. De plus les moyens technologiques pour établir une liaison entre les deux côtes ne semblent pas avoir été anticipés, ce qui occasionna du retard dans l'entrée en lice des Potez de reconnaissance. Ce qui est dommage quand on sait que la collaboration avec le 16e CA semble avoir bien fonctionner.

Malgré un moyenne de deux mission par jour, les chasseurs se montrèrent  inefficaces pour couvrir les troupes au sol ou les appareils de reconnaissance : leur nombre était trop faible... la discipline de vol peut-être également.

Les moyens de bombardement furent également très limités. C'est assez facile à expliquer. D'abord, les bombardiers opérant depuis la France auraient dû survoler, sans escorte, une large part de territoire tenu par l'ennemi et intervenir, sans couverture, au-dessus d'une zone "infestée" de chasseurs allemands. De plus nos moyens en bombardement étaient accaparés par l'offensive de réduction des têtes de pont allemandes sur la Somme. Dès lors seules de petites expéditions ou des raids nocturnes étaient réellement envisageables.


Romain Lebourg
Administrateur de la Section Air du Collectif France 40
Membre de France 40 reconstitution et Normandie-Bretagne reconstitution
Auteur du Blog de l'aviation de reconnaissance et d'observation

Sources :
  • Journaux de marche et d'opérations des GAO 503, 504, 552, GB I/63, GR I/14 et II/52
  • Bibert Xavier, Commandant Alain Claude Francis Mousset, www.bibert.fr, décembre 2015
  • Cornwell Peter, The battle of France then and now, After the battle 2007
  • Ehrengardt Christian-Jacques, Le bombardement français Volume 1 : 1939/1940, Aérojournal HS n°5, juin 2003
  • Ehrengardt Christian-Jacques, Le Loire-Nieuport 40, Aérojournal n°23, août-septembre 2011
  • Ehrengardt Christian-Jacques, Le Vought 156-F, Aérojournal n°17, août-septembre 2010
  • Joanne Serge, Le Bloch MB-152, Histoire de l’aviation n°13, Lela presse, mars 2003
  • Morareau Lucien, L’aéronautique navale française de septembre 1939 à juin 1940, Avions HS n°1 janvier 1994
  • Philippe Bernard, Le groupe de chasse II/3, Charognagrds et Lévriers dans la tourmente septembre 1939-juin 1940, Avions HS n°46, 2017
  • Roba Jean-Louis, Opération Dynamo de Boulogne-sur-Mer à Dunkerque, les combats aériens, Batailles Aériennes n°64 avril-mai-juin 2013

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